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[Flashback] Quand Le Fresnoy de Tourcoing était the place to be pour faire la fête

Aurore Garot 5 min de lecture
13 août 2024, Flashback

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Avant d'être une école d'art contemporain mondialement connue, Le Fresnoy de Tourcoing était le QG de tous les habitant·es du coin. On y venait mater un film, un match de catch ou de hockey sur patins, boire un coup, grailler un morceau mais aussi danser, faire du patin, rencontrer des gens... Bref on y faisait tout. Un lieu plein de vie et populaire qu'on a bien envie de vous raconter aujourd'hui.
On vous parle en permanence des nouveaux spots dans la métropole lilloise mais cette fois-ci, on a décidé de faire un bon dans le temps. On va vous parler d'un QG qui n'existe plus, mais qui était celui qui rassemblait tout le monde A.K.A Le Fresnoy à Tourcoing. Quel intérêt vous me direz ? Vous allez voir, son histoire vaut le détour. 
Photo d'archive.
Photo d'archive.
Remontons en 1901. Un certain Monsieur Jean Deconinck alors âgé de 30 ans décide d'acheter une partie des anciennes écuries du château Descat (11 000m²), démoli pour ouvrir le boulevard Descat. Quatre ans plus tard, en plein boom des spots pour mater des films muets, le Tourquennois décide d'y installer dans un premier temps un cinéma en plein air. Et ça fonctionne du tonnerre. "Pour éviter les resquilleurs, des croix à la craie sont dessinées sur le dos des spectateurs qui ont payé leur place", raconte dans son livre* Christine Desrousseaux, arrière-petite-fille de Jean. 

Rendez-vous au Fresnoy : l'âge d'or

Le spot évolue jusqu'à ouvrir officiellement en 1907 Le Fresnoy, complexe de loisirs avant l'heure. "Le nom vient d'un petit bois de frênes qui se dressait à cet endroit", précise Christine. Le cinéma, désormais couvert, peut accueillir 1700 personnes et l'établissement entier peut en contenir jusqu'à 6 000. On retrouve tout : ciné, resto, bar, piste de danse, piste de patin à roulettes, kiosque à musique, promenoir, manège avec des poneys, marchand de glaces, etc.

Et pour garder ce côté accessible et populaire, il suffit de payer un billet unique à 2,50 francs pour accéder pendant deux heures à absolument tout... y compris les matchs de catch. Pour vous dire, ça se bataillait dans le quartier pour se garer les soirs de combat. On venait voir le Bourreau de Béthune, le Bateman, José Arnoyo et bien d'autres catcheurs se taper dessus, en sirotant son verre et en beuglant pour son sportif préféré. Pareil pour le hockey sur patins, dont l'équipe du Fresnoy était championne de France.
Affiche d'un match de catch au Fresnoy.
Affiche d'un match de catch au Fresnoy.
Et bien sûr, l'autre rendez-vous important du Fresnoy, c'était les bals (un peu comme aujourd'hui). "Beaucoup de couples se sont formés au Fresnoy !", assure Michèle Vibert, la directrice com' du lieu devenu une école d'art contemporain en 1997. Jeunes et moins jeunes se déhanchaient sur la piste de danse notamment le dimanche, pour se retrouver et rencontrer des nouvelles personnes (sans avoir besoin de Tinder).
Archive d'un bal au Fresnoy de l'INA.
Archive d'un bal au Fresnoy de l'INA.
Par contre attention, l'excès n'était pas hyper toléré par Jean. On pouvait faire la bringue bras dessus bras dessous, mais si ça dégénérait, c'était dehors. Ce qui n'empêchait pas à l'entrepreneur d'être très apprécié. "À la fin des années 30, Jean achète une couveuse, 30 000 œufs de poule et offre à chaque client à l'occasion des fêtes de Pâques, un poussin vivant. Son secrétaire Daniel Versavel a un lit près de la couveuse au cas où il y aurait une panne de courant. Quelques mois plus tard, des coqs chantent haut et fort dans tout le quartier !", raconte son arrière petite fille.  

Une chanson, composée par Henri Loridan, conseiller municipal de Tourcoing (et chansonnier poète) lui est même dédiée : "Rendez-vous au Fresnoy".
Photo d'archive.
Photo d'archive.

L'occupation allemande pendant les guerres mondiales

Alors bien sûr, l'ambiance n'était pas la même pendant la Première et Deuxième Guerres mondiales. Le Fresnoy était à l'arrêt, occupé par les Allemands. Pendant celle de 14-18, une partie de l'établissement est même détruite.

En 1940, le lieu est réquisitionné et les soldats ennemis y entreposent des produits sanitaires et les loges. Les dégâts sont monstrueux : parquet de danse brisé, installations électriques arrachées, piano à queue disparu, patins à roulettes volés... "Plus personne n'allait danser dans les grandes salles du Fresnoy occupées par les forces allemandes. À la place des chansons et des rires, des ordres secs et l'écho des bottes claquant le parquet", écrit Christine.

Bref, un beau bordel qui marque profondément Jean. Avec son fils retenu pendant la guerre et le décès de sa femme, c'est trop. Jean se suicide en 1943 et c'est sa descendance qui prend le relais pour gérer le Fresnoy et le Colisée (car c'est aussi lui qui l'a créé). 

1977 : la fin du QG tourquennois

La vie reprend après la guerre, mais les années passent et le spot perd son succès. La faute à la désindustrialisation qui supprime l'emploi de nombreux ouvriers (qui sont les principaux clients) et à l'évolution de la société des loisirs. En 1977, le clap de fin pour l'établissement qui a fait vivre Tourcoing retentit. Ce n'est que vingt ans plus tard, que le lieu deviendra le Studio national des arts contemporains que l'on connaît aujourd'hui. 
Archive de l'expo Panorama25 de l'école d'art contemporain.
Archive de l'expo Panorama25 de l'école d'art contemporain.
Ce qui n'empêche pas au Fresnoy d'origine de refaire surface de temps en temps. En 2005, pour ses 100 ans, l'école a organisé un grand bal. "On a retrouvé des gens des générations précédentes. On a fait un ring aussi et les gens pouvaient venir avec leur sac de couchage, raconte la directrice com' de l'école. Ce lieu appartenait vraiment à la population." Reste à savoir si un autre événement flashback est prévu pour les 120 ans du Fresnoy qui auront lieu en 2025. Affaire à suivre.

Sources : 
  • Cinématographe, sur les traces de Jean Deconinck créateur du Fresnoy (2024) de Christine Desrousseaux
  • Souvenirs de la salle de spectacle du Fresnoy (1993) de l'INA
  • Articles de La Voix du Nord
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par Aurore Garot

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