Après avoir graffé sept pochoirs sur le parvis de l'hôtel de ville et sur le sol la rue Saint-Barbe en juin, le collectif de pocheur·ses La Brigade du Respect a reçu une plainte de la mairie de Tourcoing qui réclame 770€ pour "préjudice communal". Une décision jugée "lunaire" par les membres qui ont décidé de continuer la bataille juridique au nom de la liberté d'expression.
À défaut de connaître le collectif, vous connaissez surement ses pochoirs graffés sur les trottoirs de la métropole lilloise : "Girl, la rue t'appartient", "Me follow pas tu me stresses", etc. Depuis 2019, la Brigade du respect cherche à inscrire sur les trottoirs, des messages politiques et d'empouvoirement, notamment contre le harcèlement de rue (mais pas que).
"On n'a jamais de problèmes avec les mairies du coin, la police ou la BAC quand on poche, explique celle* qui a fondé le collectif. Souvent, on explique notre démarche et on nous laisse tranquille, sans arrestation, ni sanction." Sauf qu'à Tourcoing, leur dernière action n'est pas passée crème.
Amende et travaux d'intérêt général
Le 13 juin dernier, quelques jours après la dissolution de l'Assemblée par Emmanuel Macron, deux membres du collectif et un allié ont fini au commissariat de la police municipale pour une audition libre, après avoir été pris sur le fait en train de graffer 7 pochoirs sur le parvis de l'hôtel de ville et sur un trottoir de la rue Sainte-Barbe. Les messages : "Indignez-vous, À gauche toute, Président du chaos, joue pas avec nos vies".
"On s'attendait à avoir un rappel à la loi ou un avertissement", continue la fondatrice du collectif. Sauf que fin juillet, une lettre de la mairie a atterri dans la boîte aux lettres : une plainte a été déposée par la Ville avec une amende de 770€ (100€ par "tag" et 70€ de frais administratifs) pour "préjudice communal", avec une demande de "règlement à l'amiable dans un délai de 15 jours."
"On a trouvé ça lunaire. On a déjà fait une action avec Ilévia et Tourcoing en a profité comme d'autres communes où le métro passait." Sauf qu'à ce moment-là, une autorisation a été accordée par le concessionnaire, ce qui ne fut pas le cas cette fois-ci avec la mairie.
Un courrier a été envoyé par le collectif le 29 juillet à Doriane Becue, maire de Tourcoing pour expliquer la démarche militante et demander une remise gracieuse, en échange de quoi la Brigade ne viendrait plus faire des pochoirs à Tourcoing.
Au nom de la liberté d'expression
En retour, la BDR a reçu une convocation au tribunal judiciaire pour le 2 décembre. Suivie d'une lettre de la maire datant du 7 octobre, qui refuse la demande, considérant que les "agissements répréhensibles [du collectif, ndlr] contreviennent au règlement de la Propreté de la Ville et vont à l'encontre de la volonté municipale de faire respecter la propreté dans les espaces publics."
"C'est une tentative d'intimidation et de silenciation qui va à l'encontre de la liberté d'expression, déclare la fondatrice du collectif. On n'incite pas à la violence, on ne poche pas sur les murs, les passages piétons, la signalisation, bref on ne dégrade rien. Les pochoirs peuvent disparaître tout seuls au bout de 6 mois et ce ne sont pas des "tags". On ne mérite pas d'avoir un casier judiciaire, des travaux d'intérêt général et une amende dont la somme est aléatoire, pour des pochoirs qui visent à l'empouvoirement des citoyens."
Si l'allié présent lors des faits a accepté la sanction, ce n'est pas le cas des deux membres du collectif qui poursuivent l'affaire au tribunal de police au nom de la liberté d'expression. Une cagnotte a été ouverte pour celles et ceux qui veulent les aider à payer les frais de justice. "On a déjà atteint notre somme. Le surplus servira à continuer notre action en achetant du matériel."
Contactée, la mairie de Tourcoing n'a pas donné suite à nos sollicitations.