Lilloise de légende, Jeanne Maillotte a sa statue en plein milieu de l'avenue du Peuple-Belge pour une bonne raison : c'est elle qui aurait mis une raclée repoussé les rebelles protestants qui menaçaient la ville en 1582.
Quand on dit que Jeanne Maillotte est une Lilloise légendaire, c'est à prendre dans les deux sens :
- Clairement cette jeune femme est badass historiquement parlant et vous allez le lire très vite.
- En réalité, on ne sait pas vraiment si elle a existé notre Jeanne. Du coup, tout ce qu'on va vous raconter tient plus de la légende que de l'Histoire.
Allez, on repart au XVIe siècle.
Bande de Hurlus
On est à Lille en 1582. C'est l'été, il fait beau, il n'y a pas de pandémie, et tout le monde vit sa ptite vie tranquille dans la ville fortifiée... espagnole. Oui, Lille fait alors encore partie des Pays-Bas sous domination de Philippe II d'Espagne.
Ce qui ne change pas par rapport à l'histoire de France, c'est qu'ici aussi, les guerres de religions font rage. Dans la région, on est plutôt du côté catho et ça fait déjà plusieurs années que les protestants calvinistes, persécutés, se sont réfugiés du côté de Mouscron. Parmi eux, il y a ce qu'on appelle des Hurlus, des protestants un peu plus vénères que les autres qui ne comptent pas vraiment faire profil bas face aux catholiques.
D'ailleurs "Hurlus" viendrait du mot néerlandais "huurlingen" qui veut dire "mercenaires". D'autres pensent que ça vient juste du hurlement que poussaient leurs victimes. Ah oui parce que les Hurlus ne font pas que se défendre : ils attaquent aussi. Mieux, ils pillent.
A Mouscron, ils ont réussi à s'emparer du château des Comtes et se sont chauffés pour attaquer Courtrai et Tournai.. où ils ont été repoussés. Du coup, en juillet 1582, ils tentent une attaque sur Lille.
Elle est où Jeanne ?
Nous sommes le 29 juillet et Jeanne est en train de servir des chopes de bière dans une auberge de la Place des Bleuets. Oui, dans le Vieux-Lille. Sauf qu'à l'époque, on est en fait en dehors de la ville, dans ce qu'on appelle le Faubourg de Courtrai.
Et c'est par là que les Hurlus déboulent pour attaquer Lille...
Forcément, c'est la stupeur chez les Lillois qui se ruent en hurlant à l'intérieur des remparts de la ville, affolés. Selon la légende, Jeanne n'aurait pas fui, elle. Elle aurait déniché une hallebarde (une sorte de pique médiévale) et se serait ruée face aux Hurlus en entraînant avec elle les archers d'une confrérie qui étaient justement en train de boire un godet. On dit aussi qu'elle aurait aussi bien chauffé les Lillois qu'elle croisait pour qu'ils résistent eux aussi.
Résultat des courses : les Hurlus n'ont pas réussi à prendre Lille.
Icône de la résistance lilloise
De la même manière que la Déesse incarne la résistance des Lillois face aux envahisseurs de 1792, Jeanne Maillotte incarne celle face aux Hurlus 200 ans plus tôt.
Comme on vous le disait au début, rien ne prouve aujourd'hui que cette jeune cabaretière ait vraiment existé. Mais on est certain en revanche que les Hurlus ont attaqué et que Lille n'a pas cédé. Elle en est donc en quelque sorte l'allégorie. Pas que Lille soit contre les protestants bien entendu, mais plutôt que la ville ne se laisse tout simplement faire quand on l'attaque.
Le célèbre chansonnier Alexandre Desrousseaux (celui qui a aussi composé le Le P'tit Quinquin) lui a dédié un poème et en 1935, le sculpteur lillois Edgar Boutry lui a érigé la statue que vous croisez tous et toutes quand vous allez vous enjailler balader dans le Vieux-Lille, avenue du Peuple-Belge.
Pour sourcer cet article, on s'est appuyé sur un vieil extrait de la revue départementale "Le Nord" datée de février 1996 et de la page Wikipédia du château de Courtrai.